lundi 13 août 2012

A comme autoradio

Appareil destiné à diffuser de la musique dans un véhicule terrestre à moteur (VTAM pour les intimes), l'autoradio aurait été inventé en 1922. Le mien était un peu plus récent et comportait les dernières merveilles de la technologie moderne, à savoir un port usb, dans lequel je n'ai jamais déniché la femme censée s'y trouver. Comme quoi, la sagesse populaire n'a pas su s'adapter aux trépidations de ce siècle fascinant au cours duquel nous avons l'incroyable chance de vivre. Béni soit l'Iphone, comme dirait l'autre. Or donc, ce fort pratique appareil qui enchanta mes trajets domicile-travail durant cinq ans et me permit de brailler éhontément l'entière discographie de Favez à la barbe de la France qui se lève tôt en écoutant NRJ, n'est hélas plus mien. Un anonyme délinquant a forcé la porte de mon VTAM rose pour s'emparer du susdit appareil.
Je fus de longues minutes avant d'accepter la trop brutale évidence. L'affreux voleur avait tout pris : autoradio, clés usb amoureusement compilées et même le compact-disc malencontreusement inséré par mes soins dans l'objet du délit. Mais je ne pouvais croire ce que je voyais.
Est-il seulement envisageable qu'il existât encore dans ce pays des voleurs d'autoradio ? Alors que le SMIC augmente scandaleusement chaque année - à ce rythme, si l'on n'y prend garde, les ouvriers finiront par gagner en une vie le revenu hebdomadaire de Liliane Bettencourt - il se trouve des délinquants à la très petite semaine qui prennent le temps et le risque de tordre une porte de voiture, de débrancher (proprement, il faut le reconnaître) un autoradio et de refermer le véhicule. Il leur faudra encore écouler le matériel et trouver un acheteur pour un produit qui vaut,  au grand maximum, une trentaine d'euros. Voulez-vous que je vous dise ? Ces gens-là tuent le métier, ils bradent le savoir-faire et le temps n'est pas loin où le vol d'autoradio sera délocalisé dans les pays émergents, lâchement abandonné à une main-d'oeuvre dont le niveau de qualification abyssal correspond au salaire.
Quant à moi, cette profanation de mon espace sonore me laisse au coeur une sourde angoisse et une indicible colère. Je ne puis sans frémir songer aux bruyantes abominations qui seront désormais infligées à ce malheureux appareil et son probable destin, entre les mains hideuses d'une dinde manucurée ou d'un supporter de l'OM ne laisse de m'indigner. Plus encore, l'humiliation terrible qui m'a été infligée a creusé de douloureux sillons dans une existence déjà par trop malmenée dans le tangage et le roulis de l'humaine nullité : je vis donc, et la honte est proprement insoutenable, dans l'un de ces derniers bastions, engoncés au plus profond de la plus crasse province, où de pathétiques péquenauds volent encore des autoradios.

1 commentaire:

  1. Non mais tu vois, quand je pense que la peine de mort a été abolie, parfois, mon sang ne fait qu'un tour. Parce qu'à une telle médiocrité, seule la Bible ("Dieut vomit les tièdes") et la guillotine sauraient nous délivrer de la bassesse et du ridicule de ces gens-là.

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